Trois clans sont en lices à cette époque : au pouvoir, la dictature fasciste du Regent ; à l'opposé, le Parti
prolétarien, né de la fusion du PAC et des sociaux-démocrates, qui regoupe le prolétariat ouvrier, soit 20% de la
population, et se bat pour une société sans classes ; entre les deux le Pentagone, parti conservateur et nationaliste clandestin qui réunit les bourgeois libéraux attachées à l'idée de l'indépendance illyrienne (la quasi-totalité de la classe bourgeoise) et la majeure partie du paysannat, soit 57% de la population. Force potentielle réelle, le Pentagone
possède en sus l'argent, les armes, les formations paramilitaires entraînées et fournit l'armée en chefs militaires.
En 1942, le Régent de la fictive Illyrie, à l'émage de beaucoup de gouvernants d'Europe centrale (Hongrie,
Slovaquie, Bulgarie, Yougoslavie), aligne sa politique sur celle de l'Axe Berlin-Rome et déclare la guerre à l'URSS.
Cependant, il cherche à se protéger de la voracité allemande en donnant des gages à Hitler pour l'empêcher
d'envahir le pays. A l'intérieur, il traque les militants prolétariens qui sabotent sa production de guerre et le Pentagon qui organise des attentats contre lui.
En 1943, la chance tourne : le 31 janvier Freirich Paulus, feld-maréchal allemand vainqueur de Stalingrad, capitule
devant l'offensive des Russes Rokossovski et Ieremenko. De sorte que le Régent se prend à douter de la victoire de
l'Axe et change de stratégie : si l'URSS et les puissances en luttes contre l'Allemagne gagnent la guerre, il voudrait
pouvoir dire qu'il ne leur était pas hostile ... Il s'offre donc à pactiser avec le Parti prolétarien qui est resté en
contact avec les Russes pendant toute la guerre et a su conserver leur confiance, le Régent garantirait que les
opérations militaires seraient conduites avec le maximum de modération et que les troupes illyriennes attendraient le plus passivement possible que les Russes viennent les désarmer, ce qui représenterait - on s'en doute - pour l'Illyrie une économie en vies humaines considérables. Le Régent souhaite, en outre, étendre l'Union au Pentagone - dont il
subit l'hostilité - et former, à l'insu de l'Allemagne, un Comité national clandestin de Résistance (trapartie).
Voir Françoise Bagot et Michel Kail, Jean-Paul Sartre Les Mains sales, PUF, 1992, pp. 37-38. |
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